Alors que les conditions climatiques favorisent souvent une teneur en sucres plus élevée dans les raisins, la question du degré alcoolique prend une place centrale. Entre équilibre gustatif, attentes du marché et cadre réglementaire, la maîtrise de l’alcool en vinification se raisonne dès la vigne et se poursuit jusque dans le chai.
La teneur en alcool d’un vin dépend directement de la quantité de sucres présents dans les baies. Choisir des cépages ou des clones moins riches en sucre, ou encore opter pour des variétés nouvelles, permet d’orienter le potentiel alcoolique. La date de récolte est également cruciale : une vendange plus précoce réduit naturellement le degré, mais suppose de veiller à la maturité phénolique pour préserver tanins et arômes. Naturellement présents sur la peau des fruits, des organismes microscopiques appelés levures, consomment les sucres du moût de raisin et les transforment en éthanol et en dioxyde de carbone. C’est pour cela que les vins jeunes sont souvent mousseux.
En cave, la vigilance porte sur la densité, la température et la cinétique de fermentation. Ajouter des levures spécifiques peut orienter la transformation des sucres vers des voies métaboliques moins productrices d’alcool. Certaines levures non-Saccharomyces (comme Kluyveromyces thermotolerans ou Starmerella bacillaris) orientent une partie des sucres vers la production de glycérol ou d’acide lactique, permettant une réduction de 1 à 2,5 degrés d’alcool. Des souches de Saccharomyces cerevisiae à faible rendement alcoolique commencent également à être utilisées. Une fermentation interrompue volontairement, par filtration ou refroidissement, permet également d’obtenir des vins demi-secs ou moelleux, avec un profil aromatique préservé.
Quand l’équilibre reste difficile à atteindre, certaines techniques de désalcoolisation partielle offrent une solution. Colonne à cônes rotatifs, osmose inverse ou filtration membranaire permettent de réduire le titre alcoométrique d’un vin fini, dans la limite de 2 % vol autorisée par l’UE. Plus récemment, des procédés comme l’usage d’ultrasons ou la capture de CO₂ fermentaire visent à limiter la production d’alcool dès la fermentation.
Au-delà des choix techniques, une gestion rigoureuse s’appuie sur un suivi analytique régulier des sucres, de la densité et de la fermentation. Les décisions doivent également intégrer les contraintes réglementaires et celles des cahiers des charges AOC/AOP, garants de la typicité des vins. L’objectif reste le même : offrir des vins équilibrés, fidèles à leur terroir et à l’attente des consommateurs.